Elle est entrée dans sa librairie. Elle se sentait bien ; son coeur se réjouissait, son corps entier se détendait, elle s'abandonnait au plaisir de retrouver son lieu de travail. La journée commençait.
Quand certains ont imaginé le paradis comme une bibliothèque, d'autres choisiront sans hésiter une librairie. En garnissant les rayonnages de sa nouvelle librairie, Yeong-ju y met tout son coeur, comme si elle essayait, avec les livres, de renouer avec une amie perdue de vue depuis sa jeunesse. Elle répond aux demandes des lecteurs, même les plus surprenantes, elle cherche un livre pour dégeler le coeur et glisse parfois dans les volumes de petites notes de la taille d'une paume, qu'elle conclut par "ce roman m'adonné ce plaisir".
Elle découvre aussi le plaisir d'organiser des rencontres avec des écrivains, d'animer un club de lecture, d'accueillir un atelier d'écriture, de conseiller des livres avec la joie d'éteindre souvent des chagrins avec une heure de lecture. La librairie devient rapidement le coeur battant du petit quartier de Hyunam où se nouent des amitiés, des interrogations sincères sur le sens de la vie et le pouvoir des livres.
Il y a à ses côtés le barista Min-jun, qui trie les grains de café comme les mauvaises pensées, Jimi la torréfactrice passionnée, sans compter les habitués qui ont élu domicile parmi les livres, comme Jeong-seo qui tricote des éponges en forme de pain de mie entre les bibliothèques.
Une belle déclaration d'amour à la librairie.
C'est quand même amusant de constater le nombre de romans sur des librairies qui existent. Ou les bibliothèques. Après celui sur les mémoires d'un marque-page, j'adorerais en lire un sur un livre emprunté à la bibliothèque... Attendez, n'existe-t-il pas déjà un roman sur un livre qui passe de mains en mains ? A creuser...
C'est justement à cause du thème que je l'ai emprunté à la bibliothèque. Ce roman a connu un énorme succès en Corée, ce n'est qu'au fil de la lecture que j'ai fini par comprendre pourquoi.
Si l'écriture n'a rien de particulier, le fait est qu'on se sent bien, dans cette librairie, ou plutôt ce roman. Petit à petit, se constitue un groupe d'habitués, ou plutôt d'amis. L'empathie est discrète mais réelle et chacun apporte aux autres ce qui leur manquait. Chacun observe et conseille les autres avec bienveillance et franchise. Ce cercle s'étend progressivement et si les réseaux sociaux sont mentionnés (époque oblige), ils sont loin de prendre beaucoup ni toute la place.
Chacun influence positivement les autres, surtout au moment de faire des choix de vie. Ou réaliser ce qui est pour eux le plus important.
Mais ce n'est pas le plus important de ce roman. Ce sont surtout les différentes réflexions des uns et des autres sur le sens de la vie, la place et le sens du travail pour chacun dans ce pays, et la recherche du bonheur qui en font toute sa richesse. Et dans un pays où visiblement, se donner à fond dans le travail dès le plus jeune âge (beaucoup de compétition visiblement dès l'école) est la norme. Visiblement, les mentalités changent, et les nouvelles générations (entendez par là moins de quarante ans) commencent à ne plus vouloir d'une vie basée uniquement sur le travail et l'argent à gagner.
Je pense que c'est l'une des raisons les plus importantes du succès de ce roman.
En tout cas, si une telle librairie existe, j'apprécierais grandement de la visiter...
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