jeudi 7 février 2019

L'axe du loup

4 de couv' :
Pendant huit mois, Sylvain Tesson a refait le long voyage de la Sibérie au golfe du Bengale qu'effectuaient naguère les évadés du goulag. Pour rendre hommage à ceux dont la soif de liberté a triomphé des obstacles les plus grands, seul, il a franchi les taïgas, la steppe mongole, le désert de Gobi, les Hauts Plateaux tibétains, la chaîne himalayenne, la forêt humide jusqu'à la montagne de Darjeeling. A pied, à cheval, à vélo, sur six mille kilomètres, il a connu ce qu'il a cherché de plein gré : le froid, la faim, la solitude extrême. La splendeur de la haute Asie l'a récompensé, comme les mots d'une très ancienne déportée heureuse de se confier à lui : "On a le droit de se souvenir".



C'est avec un réel plaisir que j'ai retrouvé Sylvain Tesson dans ce récit qui mêle une fois de plus humour, pédagogie et une certaine poésie dans les magnifiques descriptions des paysages traversés.

Prenant prétexte de retracer la route suivie et évoquée par Slavomir Rawicz dans A marche forcée pour effectuer ce périple qui va quand même durer huit mois, Sylvain Tesson n'est cependant pas dénué d'objectivité aussi bien envers le récit de Rawicz (controversé suite à sa parution étant donné un certain nombre d'inexactitudes) que sur son propre parcours, facilité par une bonne préparation dont ne pouvaient évidemment bénéficier les évadés du goulag, et les moyens matériels et financiers dont il disposait.
Sans compter que lui n'avait personne aux trousses, à part potentiellement quelques ours ou administratifs tatillons, les tracasseries de ces derniers évacuées par une bonne pugnacité.

Comme toujours, Sylvain Tesson est ici un agréable compagnon de voyage qui, s'il s'amuse des petits travers de certains, n'est pas dénué d'auto-dérision, sait accompagner ses lecteurs en étant pédagogue sans être rasoir, le tout agrémenté de cartes, de photos (oui, même en version poche) et d'une belle qualité d'écriture.
Donc une fois de plus, merci Monsieur Tesson.

Et pour avoir un aperçu de ce parcours, je vous conseille d'aller par ici.

Et enfin, quelques citations :

" Il n'y a que le loup, créature en marge du monde, pour ne pas marcher dans la direction ordinaire. Les évadés, qui sont un genre de bête traquée, ont eux aussi emprunté cet axe conduisant du septentrion de l'Eurasie jusqu'aux versants de l'Himalaya, "l'axe du loup"..."

"Une doctoresse de Krasnoïarsk qui sent le caoutchouc neuf me fait une piqûre dans le dos. Elle m'annonce ensuite que c'est un vaccin nouveau qu'elle n'a encore jamais administré, dont elle ne connaît pas les contre-indications, et dont elle n'est pas certaine qu'il soit compatible avec les  injections que j'ai déjà reçues à Paris."

"Je découvre un nouveau sens à ma vie : marcher tout le jour durant, boire l'eau du lac, suivre la course des hérons au ras de sa surface, pêcher un poisson et passer de longues minutes à le préparer puis chercher un endroit où jeter mon bivouac. Et le sens de la nuit c'est de se reposer de cette belle vie-là."

"S'évader ne se réduit pas à quitter l'enfer : encore faut-il regagner le paradis..."
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