4 de couv' :
Los Angeles, veille de Pearl Harbour : la découverte des cadavres d'une famille japonaise, les Watanabe, incite le LAPD à fabriquer un coupable pour se débarrasser du problème. Dudley Smith, l'inoubliable "méchant" du Quatuor de Los Angeles, est sur l'affaire. Une affaire qui s'annonce lucrative, tant l'hystérie du climat de guerre se prête aux machinations au détriment des citoyens américains d'origine japonaise. L'un d'eux, Hideo Ashida, de la police scientifique, est une personnalité subtile et tiraillée par les sentiments troubles qu'il éprouve à l'égard de Dudley. De son côté, William Parker, jeune officier de police alcoolique, est décidé à anticiper le combat anticommuniste qui se profile. Pour cela, il lui faut une taupe, un agent provocateur. Ce sera Kay Lake, l'héroïne du Dahlia noir, brillante et téméraire, qui entretient des relations compliquées avec un flic ambigu : Lee Blanchard. Tous ces personnages, engloutis dans l'affaire Watanabe, se laissent entraîner dans une mortelle partie d'échecs.
Comme je l'ai déjà dit, apprécier un Ellroy, ça se mérite.
Ce n'est pas un polar qu'on dévore, mais qu'on prend le temps de déguster pour n'en rater aucune saveur. C'est à lire lentement pour bien capter et mémoriser chaque détail, sous-entendu ou allusion qui ont tous leur importance dans ce tableau d'ensemble qu'est un roman d'Ellroy. On utilise souvent l'analogie du puzzle pour un polar, elle est on ne peut plus vraie ici.
Qui plus est, l'action se déroule du 6 au 27 décembre 1941, jour par jour, quasiment heure après heure, si ce n'est geste après geste de chaque personnage.
Autant dire qu'il vaut mieux le lire quand on a du temps devant soi, et avec l'assurance de ne pas être dérangé(e).
Sur le style d'écriture, je le trouvais assez "clinique", avec l'impression que l'auteur écrivait presque un rapport dès qu'il s'agit des personnages masculins principaux, tous policiers. Le style est très différent dès qu'il s'agit du personnage féminin central (Kay Lake), et alors la narratrice (car il s'agit de son journal), comme si Ellroy lui laissait galamment la place. Une écriture à deux en somme.
En fait d'écriture, il est souvent fait allusion à une certaine musicalité chez Ellroy, en particulier le jazz.
Bingo ! C'est effectivement le cas ici : celle d'une double écriture Ellroy-Lake, peut aussi être vue comme une partition à quatre mains, d'autant que Kay, à ses moments perdus, joue du piano (plutôt du classique, pas de jazz), et qu'il est fait régulièrement allusion dans le roman à Perfidia de Glenn Miller.
Rien n'est anodin chez Ellroy.
Ce titre du roman qui résume à lui seul l'ensemble de l'histoire est donc aussi le titre de cette musique (ce qui explique le fait qu'il n'ait pas été traduit) qui fait toute l'atmosphère du roman et de cette époque.
Il s'agit peut-être d'un hommage à Glenn Miller également, décédé à la fin de la seconde guerre mondiale.
Toujours est-il hautement appréciable de lire un auteur qui visiblement ne prend pas ses lecteurs pour des idiots (je ne veux pas dire que c'est le cas des autres auteurs de polars - seulement d'un minorité d'entre eux d'ailleurs - je veux surtout dire qu'Ellroy met la barre plus haut avec assez de marge pour qu'on puisse l'attraper).
Je pourrais encore en dire beaucoup sur l'époque (difficile de considérer les Etats-Unis comme une démocratie après ça) ; sur les personnages masculins (troubles, alcooliques et/ou accros à la drogue, obsédés par les/certaines femmes, toujours à tremper dans différentes magouilles, et leur violence) et en particulier Dudley Smith qui avec ses multiples défauts est un des personnages les plus troubles mais aussi le plus constant ; sur les personnages féminins (forcément superbes, forcément intelligentes, forcément manipulatrices, fières, hautaines, de fort caractère) dont Bette Davis, excusez du peu !
Donc beaucoup à lire, et beaucoup à dire comme toujours chez Ellroy. Et pour ceux que ça intéresse, un lien supplémentaire vers une émission que j'aime beaucoup (et qui va me manquer cet été !).
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